Pour rappel, lorsque les parts d'une SCI sont démembrées, à défaut de stipulation contraire dans les statuts, l'usufruitier est normalement imposable sur le résultat courant et le nu-propriétaire sur le résultat exceptionnel (plus-value).
Toutefois, usufruitiers et nus propriétaires de parts démembrées peuvent conventionnellement prévoir une répartition des résultats sociaux différente et notamment que le nu-propriétaire sera seul imposable par exemple. Pour autant que cette convention soit licite et qu'elle ait été conclue ou insérée dans les statuts avant la clôture de l'exercice aux termes d'un acte régulièrement enregistré.
Par ailleurs, constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt.
Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.
Rappel des faits :
La SC A est usufruitière de 499 parts de la SCI P dont M. A D, qui est cogérant de la société, est nu-propriétaire. M. A D détient en outre en pleine propriété une part de la SCI P, le reste du capital étant réparti entre son frère, M. B D, également cogérant, pour une part en pleine propriété et 499 parts en nue-propriété et la SC E, usufruitière de ces 499 parts.
La SCI P était propriétaire d'un bâtiment industriel situé à Haguenau, donné en location à la SAS CETAL, dont le président est M. C D, fils de M. B D.
Par acte notarié du 6 décembre 2016, la SCI P a cédé ce bien immobilier à la SAS CETAL au prix de 1 630 000 € et réalisé ainsi une plus-value de 1 097 454 €.
La SC A, qui est soumise à l'impôt sur les sociétés, a mentionné dans sa déclaration de résultats au titre de l'exercice clos en 2018 un résultat exceptionnel de 237 050 €, correspondant à une quote-part de la plus-value réalisée par la SCI Piger égale à 21,6%.
A la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a estimé que la SC A pouvait prétendre à une part du prix de vente du bien immobilier en cause égale à la somme de 353 129 € et qu'en renonçant sans contrepartie à la différence entre cette somme et celle qu'elle avait effectivement perçue, elle avait commis un acte anormal de gestion à concurrence de ce montant, soit 115 079 €, qui a été réintégré dans son résultat imposable au titre de l'année 2018.
La SC A a été assujettie en conséquence de cette rectification, qui a été assortie de la majoration pour manquement délibéré, à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2018.
La SC A a demandé la décharge de ces impositions ainsi que le rétablissement de son déficit reportable.
Le Tribunal administratif vient de rejeter la demande de la SC A.
Le Tribunal nous rappelle qu'en cas de démembrement de droits sociaux, l'usufruitier, conformément à l'article 582 du code civil, n'a droit qu'aux dividendes distribués.
Toutefois, les dispositions de l'article 8 du Code Général des Impôts ne font pas obstacle à ce que soient tirées les conséquences d'une convention par laquelle le nu-propriétaire de parts de sociétés de personnes a conféré à leur usufruitier des droits dans les bénéfices sociaux différents de ceux qui résulteraient de la seule application de l'article 582 précité, auquel cas les bases d'imposition doivent tenir compte des règles de répartition des bénéfices résultant de cet acte ou de cette convention.
Or justement, au cas particulier et préalablement à la vente du bien immobilier M. A D et la SC A ont convenu par convention :
Pour le tribunal cette renonciation a percevoir la somme de 115 079 € caractérise un acte anormal de gestion.
Qu' il résulte de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas contesté par la SC A, qu'elle n'a ni perçu ni déclaré la différence, égale à 115 079 €, entre la somme de 237 050 € correspondant à la quote-part du résultat exceptionnel de 1 097 455 € qui lui a été attribuée par l'assemblée générale ordinaire de la SCI Piger dans sa délibération du 11 mai 2017, et la somme de 352 129 €, qui lui revenait en application de la convention du 2 décembre 2016.
Dans ces conditions, la renonciation par la SC A à percevoir cette somme doit être regardée, eu égard à la communauté d'intérêt unissant la société requérante et M. A D, qui en est le cogérant et l'associé, comme une libéralité consentie par la société à M. D, qui a ainsi obtenu une part du prix de vente supérieure à celle qui lui était attribuée par la convention du 2 décembre 2016.
C'est, dès lors, à bon droit que l'administration a estimé que cette renonciation à une recette caractérisait un acte anormal de gestion et a réintégré la somme correspondante dans le résultat imposable de la société requérante au titre de l'année 2018.
Le tribunal confirme également la majoration pour manquement délibéré prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du Code Général des Impôts.
« La contribuable ne pouvait ignorer qu'elle renonçait à percevoir une fraction significative de la quote-part du prix de vente de l'immeuble de la SCI P qui lui était attribuée par la convention du 2 décembre 2016.
Contrairement à ce que soutient la SC A, les stipulations de cette convention sont claires et reflètent la commune intention des parties à l'acte. Il suit de là que les faits ainsi relevés par l'administration caractérisent, eu égard au surplus à l'importance de la somme en litige, la volonté délibérée de la part de la SC A d'éluder l'impôt. Le moyen tiré de ce que l'administration n'établit pas l'intention délibérée d'éluder l'impôt justifiant l'application de la pénalité en litige, ne peut dès lors être accueilli. »
Source : TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE STRASBOURG DU 29 AOÛT 2023, N° 2204004
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