Le Gouvernement entérine l'article 13 de la loi du 24 août 2021 « confortant le respect des principes de la République » qui a rétabli un droit de prélèvement compensatoire sur les biens situés en France au profit d'enfants qui ne bénéficieraient pas d'une réserve successorale en application d'une loi étrangère.
Pour mémoire, l'article 13 de la loi précitée a renforcé la protection des héritiers réservataire en prévoyant qu'en l'absence de mécanisme réservataire protecteur des enfants prévu par la loi étrangère applicable à une succession, ces derniers puissent exercer un prélèvement sur les biens du défunt situés en France pour être rétablis dans les droits réservataires que leur confère la loi française.
En pratique, l'article 13 a complété l'article 913 du code civil afin de permettre aux enfants évincés d'une succession, pour quelque motif que ce soit, de récupérer une part successorale sur les biens situés en France.
Il prévoit que, lorsque le défunt ou au moins l'un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d'un État membre de l'Union européenne ou y réside habituellement, et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne connaît aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants, situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci.
Les conditions de mise en œuvre de ce droit de prélèvement sont claires. Il faut que la loi étrangère à laquelle est soumise la succession ne prévoie aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants et que le défunt ou l'un au moins des enfants soit ressortissant d'un État membre de l'Union européenne ou y réside habituellement.
Précisons que le Sénat avait, lors de l'examen du texte de loi, supprimé cette mesure qui pour eux manquait l'objectif que s'était assigné le Gouvernement (« mettre fin à l'application de règles successorales étrangères sur notre territoire qui lèsent les femmes ») et qui pourrait avoir des « effets de bord » importants qui n'ont pas été expertisés, en incluant de manière certaine tous les pays de droit anglo-saxon.
Saisi pour avis sur le projet de loi, le Conseil d'Etat a considèré que les dispositions proposées ne soulèvaient pas de difficultés d'ordre constitutionnel et étaient susceptibles d'entrer dans les prévisions de l'article 35 du règlement (UE) n° 650/2012.
Le député des français de l'étranger a interrogé le Gouvernement relativement à ce mécanisme de prélèvement compensatoire institué au titre des successions internationales depuis le novembre 2021.
D'après l'article 22 du règlement européen n° 650/2012, « une personne ayant plusieurs nationalités peut choisir la loi de tout État dont elle possède la nationalité au moment où elle fait ce choix ou au moment de son décès ». En effet, dans le cas d'un individu possédant une double nationalité, si celui-ci établit son testament dans son second pays à l'étranger, dont il possède la nationalité, est-il préservé de l'application de la loi nationale même s'il décédait en France ?
Si ce même individu souhaite déshériter l'un de ses 2 enfants et si la loi du pays dans lequel il l'a établi le permet, quelle difficulté cela pose-t-il dans sa situation ?
L'actuelle jurisprudence semble enfin établir, d'après un arrêt de la Cour de cassation du 27 décembre 2017, que la réserve héréditaire n'était pas un principe d'ordre public.
Enfin, il lui demande s'il n'y a pas une atteinte aux libertés individuelles en refusant à un individu possédant la double nationalité de déshériter quelqu'un de sa famille.
Le Gouvernement vient de répondre au parlementaire en entérinant définitivement cette mesure.
L'objectif de cette disposition introduite par la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021« confortant le respect des principes de la République » est d'éviter que le défunt discrimine ses enfants issus de différentes unions, ou évince certains de ses enfants en raison de leur sexe, de l'ordre des naissances, de la nature de la filiation ou encore de la religion.
Ainsi, en permettant aux enfants évincés d'une succession qui n'est pas régie par la loi française de récupérer une part successorale sur les biens situés en France, le législateur est revenu sur la jurisprudence de la Cour de cassation (1re Chambre civile, 27 septembre 2017, pourvoi n° 16-13.151, Publié au bulletin) et a fait de la réserve héréditaire un principe d'ordre public international.
En conséquence, si cette disposition constitue une exception à l'application normale d'une règle de conflit de loi, elle entre toutefois, comme le souligne le Conseil d'Etat dans son avis sur le projet de loi confortant le respect, par tous, des principes de la République du 9 décembre 2020, dans les prévisions de l'article 35 du Règlement Successions, qui prévoit la possibilité d'écarter les dispositions de la loi applicable au règlement de la succession si cette application est manifestement incompatible avec l'ordre public de l'Etat qui statue sur le règlement de la succession. Le Conseil d'Etat a également considéré que cette disposition ne soulevait pas de difficultés d'ordre constitutionnel.
Au vu de l'ensemble de ces éléments, l'article 913 alinéa 3 du code civil assure un juste équilibre entre, d'une part, la liberté du défunt de disposer de ses biens, et, d'autre part, la nécessaire protection des proches du défunt contre les discriminations dont ils pourraient être l'objet.
Source : Réponse Ministérielle HABIB JOAN du 21 novembre 2023, Question n°7936
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